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  • : Chroniques électroniques - Chroniques de disques, de concerts, de festivals, de soirées de musiques électroniques, rap et bien d'autres...
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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 10:41

Sortie : Février 2012

Label : Permanent Vacation

Genre : House, electronica

Note : 5,5/10

 

Barcelone a beau être une ville fascinante avec ses nuits dédiées à une musique électronique débridée, il n’en demeure pas moins qu’elle engendre très peu d’artistes électroniques de qualité. Comme si la déflagration des Sonar et autres Primavera se posait comme un frein à toute création artistique digne de ce nom. Etrange paradoxe pour cette ville pourtant affranchie des modes et préférant devenir son propre modèle plutôt que d’aller puiser des idées dans les autres capitales culturelles de l’Europe.

Mais le sujet n’est pas là. Ce qui nous intéresse ici est l’explosion récente de John Talabot. Avec fIN, son premier album, le catalan déboule avec fracas sur l’échiquier électronique et remet ainsi Barcelone au centre des enjeux. Fin est encensé à tout va par la presse, on crie au génie à peu près partout… sans vraiment savoir pourquoi d’ailleurs, d’autant plus que de mon côté il est clair que l’album est loin d’être brillant.

John Talabot puise son inspiration principalement dans les 80’s synthétiques et élégiaques et donne à sa musique des accents de house groovy et d’électronica luxuriante. Le problème est que l’album ne fonctionne que le temps d’une mi-temps, la deuxième. En effet, la première partie est d’une inconsistance folle. Du groove lascif mais routinier de Depak Ine, aux modulations stériles d’El Oeste, en passant par l’électro-pop typiquement catalane de Journeys (avec Ekhi des sinistres Delorean), on ne peut s’empêcher de trouver cela inintéressant, plat et naïf. John Talabot tombe dans l’écueil de l’album fourre-tout tant il en rajoute des tonnes alors que ses compositions auraient mérité bien plus de retenu.

Mais voilà, le John nous prend à revers avec une deuxième partie bien plus captivante. S’en est fini des élucubrations méditerranéennes à deux balles, il est désormais temps de s’émanciper géographiquement. Ainsi, Last Land et Estiu lorgnent intelligemment du coté de la scène électronica californienne de ces trois dernières années (R.I.P.) avec pour le premier une fragile escapade diurne et pour le second une vision nocturne titubante. De même, le groove se fait prenant avec l’enveloppant  When The Past Was Present. Talabot se permet le luxe de garder le meilleur pour la fin avec la moiteur de la house chicagoanne de So Will Be Now... (avec Pional) qui risque fort d’en laisser plus d’un sur le carreau tant le morceau n’en finit plus de s’imposer par la force d’un minimalisme contagieux. Ouf, l’honneur est sauf.

fIN est un album brinquebalant ayant du mal à se stabiliser. On a l’impression que John Talabot a voulu trop en dire en 50 minutes. Le résultat est loin d’être à la hauteur mais il est clair que le barcelonais a du potentiel. A suivre.

 

http://cdn.stereogum.com/files/2012/01/John-Talabot-fIN-608x608.jpg

 

par B2B

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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 10:30

Sortie : Février 2012

Label : Self-release

Genre : Abstract Hip-hop, Rap

Note : 7,5/10

Portsmouth abrite les cinq membres de Swampglow. Leur quatrième et ultime délire sort ce mois-ci. Cette chronique est écrite la larme à l’œil, le cœur engourdi, à l'heure où le slogan « Le Hip-hop est mort » sert de propagande à l'Electro s’affirmant comme son successeur. Cependant, certains rappeurs continuent à créer leur propre concept, dans des œuvres au montage cinématographique. Le rap est toujours à son apogée qualitatif avec ce genre de procédé. Il suffit de prendre toute l’œuvre de MF DOOM, Anticon, ou récemment les novateurs d'Odd Future, pour voir que l’appellation Abstract Hip-hop est souvent liée à une forme de Rap concept scénarisé. L'album du groupe anglais en question a pour racines une thématique autour des jeux-vidéo.

« We must teach children the difference beetween the virtual world and the real world ! » telle est la problématique fournie dès les premières secondes, se moquant clairement des médias et de la perception même de tout l'univers geek, qui tentera d'être complétée avec dérision tout au long de l'album. Certains beats possèdent des sonorités 8 bit, sans tomber dans le Hip-hop chiptune bien trop souvent exaspérant. Les plus anglophones apprécieront d'avantages l'absurde et l'humour des paroles de Swampglow, ainsi que les extraits audio conférant comme toujours des entractes jouissifs scénarisant l'album d'un bout à l'autre. Un beatbox modeste et amusant ponctue quelques transitions de l'album. Jill valentine lay half naked in a large puddle, awaiting death possède un sample classique, d'une efficacité redoutable et dont la maîtrise soulage : ils ne font pas n'importe quoi avec la musique à casquette. Une sensation de légère variation autour du Hip-hop flotte tout au long de l'écoute, et l'univers dense et fascinant dissimule les moyens du groupes derrière une véritable singularité créative. Le flow de nos compères s'inscrit dans la lignée du décalage de Radioinactive, Busdriver et Dose One, figures de proue de cette façon de rapper. Le si bel accent anglais épice le tout similairement au timbre de voix de Scroobius Pip, ayant déjà surfé sur un style similaire. Nous avons affaire à plusieurs personnages, à barbes longues et aux vêtements trop petits, skateurs et cinéphiles, à encore parler de la sortie de L'Empire contre-attaque à 40 piges comme si c'était hier. Les références sont nombreuses et l'album a le mérite de s'écouter plusieurs fois avec plaisir. La génération Super Famicom trouvera chaussure à son pied dans helping you back to work. Avec des titres de morceaux aussi décalés que deleting the doors on the sims et une cover aussi osée, votre second degré ne peut que être rassasié, dans un premier temps au moins.

Swampglow est un étalage de fruits divers et variés explorant tout l'exotisme du Hip-hop. Chaque morceau dévoile une trouvaille supplémentaire. Chaque auditeur trouvera un point positif et négatif différent à l'album. L’œuvre est gratuite ici, ce qui est exceptionnel pour un album aussi conséquent avec 20 morceaux de choix.

 

http://f0.bcbits.com/z/17/80/1780301315-1.jpg

 

par Pneu Rouillé

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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 13:52

Sortie : 13 février 2012

Label : Echocord

Genre : Dub-techno

Note : 6,5/10

 

Echocord ne nous a jamais totalement déçu. Depuis quelques années, le label enchaîne les sorties dub-techno de qualité. Mais on ne peut pas en dire autant de Fluxion car si le grec demeure une sommité dans le milieu, force est de constater que certaines de ses productions s’avèrent trop linéaires, à l’image de Perfused son précédent long format. Et justement, Traces, 6ème album en un peu plus de 10 ans, bien que réussissant à nous scotcher le temps de quelques morceaux, n’en demeure pas moins trop prévisible.

On a l’impression que le grec Konstantinos Soublis s’enferme dans un dub-techno trop formatée, que les prises de risques ne sont plus possibles. Pourtant, Fluxion a été éduqué à l’école Chain Reaction, sous label de Basic Channel (si je vous dis Maurizio, ça devrait vous mettre la puce à l’oreille). Le mec n’est donc pas un branleur, il sait de quoi il en retourne. D’ailleurs, s’il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher à Traces, c’est son côté chirurgicale implacable. Tout y est clair, net et précis, de telle sorte que les sons semblent littéralement vous traverser le corps. Il n’y a pas à chier, la clique d’Echocord excelle dans le domaine de la masterisation. Traces n’est pas un album de dub-techno d’apparat, bien au contraire. Ici, tout est question de sobriété, de lancinance et de formes arrondies. Fluxion se focalise sur la basse, rien d’autre n’a d’importance.

Alors au début, on se prend au jeu, d’autant que l’album est bien foutu et joue la carte de l’immersion par la force d’une progression intelligente. Passé le vaporeux Motion 1, Fluxion se paie même le luxe de ressusciter Dennis Brown pour une version gonflée à la skunk de No Man is An Island. Mais malheureusement, on tient là la seule audace visible de l’album. S’en suit quelques morceaux plus frontaux, à la basse impressionnante, vous scotchant profondément. Et puis tout s’effrite sur la dernière partie du disque. La faute à une trop grande prévisibilité ? Sans doute. De Memba à Butiama, on s’ennuie devant trop de linéarité assumée. Le disque s’éternise alors (dépassant le seuil critique des 60 minutes, comme tout skeud de dub-techno l’exige) et on finit par s’échapper de cette atmosphère enfumée.

Ce disque fait penser à un voyage en train (ce n’est pas anodin si de nombreux clips dub-techno se servent de cette cadence métronomique). Au début, vous observez le paysage défiler sous vos yeux avec attention et puis, petit à petit, vos songes prennent le dessus et vous finissez par regarder sans regarder.

En même temps, et c’est paradoxale, Fluxion a tout de même réussi à nous anesthésier l’esprit et cela reste un exercice difficile. Il n’est pas aisé de maintenir l’auditeur dans une léthargie volontaire. Une solution existe donc pour profiter pleinement de cet album, il suffit de se limiter au 6 premiers morceaux. Ces 40 minutes suffiront largement à vous maintenir sous perfusion.

 

http://www.colette.fr/files/image_high_def_174816_fr.jpeg

 

par B2B

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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 00:01

Sortie : février 2012

Label : Bureau B

Genre : Electro-acoustic, Electronica, Ambient, Shoegaze

Note : 8/10

 

Musicien de renom, Ulrich Schnauss est un compositeur allemand qui s'est illustré par des oeuvres d'électronica éthérée, mêlant l'ambient et le shoegaze. Marqué par Cocteau Twins, Tangerine Dream et My Bloody Valentine, il commence sa carrière à milieu des années 90's sous des alias tels que View To The Future et Ethereal 77. Il est aujourd'hui à son cinquième album parus sous son vrai nom, parmi lesquels des bijoux impondérables de l'ordre de A Strangely Isolated Place, sorti sur le label City Centre Office. Mark Peters est l'une des deux têtes pensantes du groupe de dream pop shoegazée Engineers, qui compte nul autre que ledit Ulrich aux claviers. Ce dernier, après un album en collaboration avec Jonas Munk, invite Peters à la guitare et à la basse, pour un Underrated Silence très attendu, sorti chez l'hambourgeois Bureau B

 

Cet album sonne comme une déclaration amoureuse à la nature, louant l'exaltation des sens que prodiguent les espaces vides et vastes, montagneux, végétaux et piquants. Il est en cela d'abord, infiniment romantique. Les premières incursions aux confins de Underrated Silence sont aussi déstabilisantes que l'odeur si fraîche de l'air lorsque l'on met plusieurs dizaines de kilomètres en soi et la ville. A titre de précision : je m'efforcerai de ne pas démultiplier dans cette chronique les métaphores botaniques, aériennes etc, probablement sans y parvenir. 

Pures et hautement oxygénées, les orchestrations sont la clef de voute de l'équilibre que questionnent les deux musiciens, le temps de 54,5 minutes. Confèrent un sentiment d'urgence doucement euphorique, les cordes de Peters s'entremêlent aux stratifications mélodiques construites par son compère et les constelle de cendres chatoyantes. Les beats, ténus mais sophistiqués, semblent enrobés d'une gangue de givre. L'identité et la passionnante finesse d'Ulrich Schnauss n'est en rien voilée. Les qualités individuelles de chacun siéent admirablement à celles de l'autre. S'éloignant -  un peu seulement - des tournures teintées de post-rock qui pouvaient caractériser les oeuvres de l'Allemand en solo, la musique des deux s'accorde sur des mélanges de compositions électro-acoustiques languissants, d'électronica et d'ambient charnel, teinté de nuances de pop sombre et avant-gardiste. Car les souffles qui hantent Underrated Silence ne correspondent en rien à de radieux alizés. Suggérant la mélancolie dans ce qu'elle a de plus vibrant, la douleur qui s'apaise pour l'instant d'après rejaillir, béante, mais aussi la douceur de sentiments plus humbles, le caractère émotionnel de l'album semble le premier fondement de sa nature romantique. Comment qualifier autrement l'introduction fleurant bon Boards Of Canada de Yesterday Didn't Exist, ses longues nappes absentes semées d'une grêle cristalline, et son évolution en complainte émaillée et crève-coeur ? Sans hasard, les morceaux qui m'épinglent le plus restent les plus noirs, bien que rien au sein de ce très beau disque ne semble intégralement désemparé. Les épanchements, pourtant plombés, du sublime Ekaterina se changent en lumineuse quiétude, une fois leur paroxysme atteint. Je demeure un brin moins sensible à une pièce telle que Rosen In Aspalt, qui m'évoque (argh) Beirut et consorts. Citons par ailleurs la grâce de l'intervention de Judith Beck sur Forgotten, son timbre de vestale désillusionnée et son jeu de guitare touchant et moelleux. Les mélodies d'Ulrich Schnauss et Mark Peters dégagent un je-ne-sais-quoi d'intemporel. Ainsi les dialogues instrumentaux des cordes et du piano de The Child Of The Pigeon le placent quelque part hors du temps.

 

S'il y a des silences sous-estimés, il y a des disques dans lesquels on ne se plongera pas assez. Ode aux espaces vides de nature humaine, Underrated Silence est un album fait de dédales organiques et d'émotions pures. La collaboration entre les deux musiciens a enfanté d'une très belle oeuvre, émouvante et recommandée. 

 

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par Manolito

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 10:41

Sortie : 14 Février 2012

Label : History Always Favours The Winners

Genre : Néo-classique, dark ambient, sampling

Note : 8,5/10

 

Difficile de suivre pleinement les incalculables sorties deLeyland Kirby. Le mec a bien dû laisser éclore 20 disques en moins de 3 ans. Cet acharnement aura eu le mérite de susciter l’attention. De plus, l’homme brouille les pistes puisqu’il opère sous de nombreuses entités tant il fourmille de projets, et ce même si on retrouve un même esthétisme sonore dans toutes ses pièces. Leyland Kirby est un érudit qui s’accomplit en puisant dans les niches intellectuelles et auditives.

Ainsi, sous l’entité de The Caretaker (dont le nom est emprunté au personnage de The Shining), il a dernièrement exhumé d’obscurs 78 tours du début du XXème, les a tronqués, samplés et a amplifié le grain pour livrer un album étrangement sombre et fragile. An Empty Bliss Beyond This World mérite qu’on s’y attarde avec précision (écoute intégrale ici).

 

Patience (After Sebald) est le nouveau projet de l’anglais (écoute intégrale ici). Il s’attaque à la bande son du prochain documentaire de Grant Green qui s’attardera sur la vie de l’écrivain WG Sebald. Pour cela, The Caretaker est allé fouiner dans l’œuvre de Schubert et plus précisément dans un enregistrement de 1927 de Winterreise (composé en 1827).

Le piano de Schubert est placé en retrait, semblant surgir d’un brouillard extrêmement dense. L’opacité oblige à écouter attentivement pour se sentir concerné car si le piano n’est pas le personnage principal, il n’en demeure pas moins le pivot. C’est surtout l’impressionnant magma entourant le noble instrument qui prend ici l’ascendant. Cette masse sonore indéchiffrable pousse à l’interprétation. S’agit-il du gaz que l’on a oublié d’éteindre ? D’une pluie incessante ? D’un vent continue ? Libre à chacun de jouer avec ce bruit de fond fascinant car toute la force de Patience (After Sebald) se trouve justement dans cette volonté de pousser l’auditeur à l’introspection. Au final, le mariage entre le retouchage de Schubert, pour un rendu néo-classique, et les nappes et crépitements incessants, pour l’enrobage dark-ambient, est consommé et le rendu magnétique.

Patience est un album mélancolique, pour ne pas dire dépressif. Les compositions de Schubert sont tronquées, Leyland Kirby préférant se servir de bouts de partition pour ainsi les répéter à l’envie afin de capturer l’auditeur dans une lancinance extrême provoquant la tristesse. Le pouvoir ensorcelant de ces 12 titres est sidérant et on se prend au jeu du déchiffrage. On n’est jamais réellement certain de ce que l’on écoute tant tout est fantomatique. Est-on sûr d’entendre une mélodie en arrière fond de Approaching the outer limits of our solar system ? Ne sommes-nous pas en train de rêver ? Patience (After Sebald) nous oblige à tâtonner, à avancer à l’aveugle dans un paysage de désolation.

Mais étrangement, derrière cet enrobage mélancolique, se trouve un album fier. Jamais l’impression de tomber n’est ressentie. On avance indubitablement, face au vent. Impossible de mettre un genou à terre tant l’album vous pousse à poursuivre votre quête. Quand je vous dis que The Caretaker est capable de vous ensorceler, croyez-moi.

 

The Caretaker semble avoir retrouvé ces pistes de Schubert dans un manoir du XVIIIè siècle. Les partitions sont jouées par un fantôme dans une immense salle de bal, ouverte aux quatre vents. Vous devenez un simple spectateur, un spectre évoluant parmi les ombres. Vous fermez alors les yeux et vous n’êtes plus, vous vous contentez de ressentir cette musique traversant les époques pour devenir indatable, indéchiffrable et impalpable.

 

 

http://f0.bcbits.com/z/35/21/3521552049-1.jpg

 

P.S. : The Caretaker vient de publier les chutes de l'album. Vous pouvez prolonger l'expérience ici.

 

par B2B

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19 février 2012 7 19 /02 /février /2012 01:22

Sortie : janvier 2012

Label : Tench

Genre : Drone, Ambient, Abstract, Experimental

Note : 8,5/10

 

Il y a encore peu de temps, Marcus Fischer était simplement connu par les quelques érudits qui parcouraient son blog : Dust Breeding. Puis il y eut la rencontre avec Taylor Deupree et son label 12k. Si ses deux albums publiés sur la crémerie abstraite de Brooklyn, Monocoastal et In A Place Of Such Graceful Shapes (en collaboration avec Deupree) sont souvent cités comme des albums d'exception, son Arctic/Antarctic vaut également plus que le détour. Le Collected Dust dont il est aujourd'hui question, offre des versions différentes et re-travaillées  à des titre déjà existants sélectionnées par M. Ostermeier, artiste et chef du label Tench. Comme si cela ne suffisait pas, le mastering de l'oeuvre a été fait chez 12k.

 

On savait Marcus Fischer orfèvre de la texture polaire. Mais son véritable tour de force prend son essence dans sa capacité à donner à sa musique froide et minimaliste, des compétences de couverture laineuse épaisse. Il émancipe les drones de leurs chaînes hermétiques, leur offrant une errance libre sur une banquise mélodique ponctuée de fields recordings aussi subtils que les guitares acoustiques sont discrètes et graciles. Collected Dust est conçu sur un équilibre fragile, et offre des émotions pures.

L'amplitude entre les fréquences basses et les aigus est troublante. Mais ce grand écart sublime l'aspect pénétrant et contribue à l'immersion totale. Des lignes droites et infinies semblent se former dans la poudreuse immaculée (Nearly There), traçant le chemin vers un point de chaleur revigorant. Un oued perdu sur les fjords (Cold Days). Des sommets de volupté sont atteints sur la fresque pleine de paix durable Halfway To Six tandis qu'un vent frais et sucré envahit les immensités gelées de Span. Un semblant de phénomène de fonte semble s'entamer. Le jour et sa lumière blanche incandescente apparaissant par la suite sur Wires On Carpet et Sixteen Shapes, ne sauraient rompre cette étrange sensation de sainte plénitude et de symbiose avec un paysage qui reste à deviner. L'effort est à porter de main, et l'album en vaut bien la chandelle.

 

Collected Dust est avec Ballads Of The Research Department de The Boats (ici) l'oeuvre abstraite de ce froid début d'année. Car telle une succession de captures instantanées dans le grand nord, traversant la nuit et l'aurore, Marcus Fischer se joue des contrastes et ravive les lueurs de l'ambient polaire. Un coup de sirocco à destination des coeurs transis.

 

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par Ed Loxapac

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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 17:38

Date : 17 février 2012

Lieu : Café de la Danse, Paris

 

Vendredi soir, le Café de la Danse a fait place au compositeur et pianiste allemand Nils Frahm, acclamé par la critique pour des oeuvres telles que Felt, mis en lumière par le label Erased Tapes, ou ses collaborations avec Anne Müller ou F.S. Blumm. La soirée présente également Grey Reverend, songwritter new-yorkais signé par Jason Swinscoe de The Cinematic Orchestra, et en première partie, Sleepingdog, formation belge menée Chantal Acda (chronique de leur dernier album ici).

 

A peine le chant et les premières notes de piano de Sleepingdog s'élèvent que la petite salle de la Bastille se couvre d'une chape feutrée qui ne se dissoudra que des heures plus tard. Les arrangements sont minimalistes, la voix de la chanteuse, feutrée et l'ambiance, joliment crève-coeur. Le folk alangui et délicat du duo, évoquant tantôt l'heavenly voices de Cocteau Twins, tantôt les morceaux les plus dépouillés de Dead Can Dance, plonge l'auditoire dans des conditions proche du recueillement solennel. Nils Frahm les rejoint le temps de deux morceaux, les accompagnant au tambourin puis au piano.

 

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La fait de prendre l'air en attendant Grey Reverend a des goûts de petit matin hagard. Il est à peine 21h. Sous l'emprise de ces musiciens intimistes, le public se métamorphose en une multitude de cocons individuels, que brisent en intolérables parasites le moindre chuchotis ou bruit de gobelet. Le musicien de Brooklyn, du nom de Larry D. Brown, s'installe derrière sa guitare. De son seul instrument et de sa voix chaude s'échappent de douces complaintes, aux mélodies simples et belles. Cette heure de blues folk élégant et atemporel a des effets de tranquillisant cotonneux, et sonne comme une invitation salvatrice à un heureux moment de léthargie.

 

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Puis vient Nils Frahm, loquace et avenant, qui ouvre par Said And Done. La répétition d'une même note, qu'il étire et intensifie, ses accords beaux à crever et ses avant-bras semblables à des langues animales qui pourlèchent la surface des touches, évoquent le minimalisme américain d'un Philip Glass : le piano comme moyen d'hypnose étreint une salle dont le souffle paraît respectueusement suspendu à la moindre variation phrastique. Entre un piano à queue préparé et un synthétiseur, parfois une main sur chaque, Nils embrasse l'angle formé par les deux instruments. Du second, il tire soudain des drones, nappes tapissant alors la bulle contemplative et bouleversante qui croît autour du musicien. Enchainant sur le sublime More, il m'évoque un tisseur de grelots, brodant l'espace d'arabesques diaphanes, formant sous ses doigts des pièces transperçantes, paisibles, évanescentes ou vivaces. Une importance toute particulière est accordée aux variations de force, aux silences, aux bruissements et bruits du toucher. Sans peut-être en avoir conscience, Nils Frahm offre à son public les clés d'une lecture sensible et introductive à la composition contemporaine au piano, un apprentissage acoustique décomplexé et débarassé des atours souvent austères et hermétiques des musiciens de conservatoire.

 

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Il est plus de 23h, et la petite bruine qui couvre le quartier parisien de la Bastille réveille doucement les spectateurs, dont on jure que beaucoup rentreront à pas lents, plus lents encore, vers un chez-eux inversé en un en-dehors : le cocon, ce soir, n'était pas à la maison, mais niché au sein du pouvoir évocateur et apaisant de la musique. C'était cela, peut-être, le plus beau.

 

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par Manolito et Pingouin Anonyme

crédit photos : Sabrine Demmi

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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 14:52

Sortie : janvier 2012 (en digital)

Label : Pan European Recording

Genre : Musique Concrète, Minimalist, Experimental

Note : 8/10

 

Comme le dit son site officiel, Jonathan Fitoussi est un musicien trentenaire parisien. Fusionnant les sphères acoustiques et électroniques à l'aide d'un matériel le plus souvent analogique, il peut légitimement se réclamer des artistes qui ont forgé sa culture musicale. Je parle de Pierre Schaeffer, de Pierre Henry ou plus tard de Steve Reich, pionniers des musiques concrètes et ou contemporaines. Il rencontre en 2008 Alexandre Bazin, avec qui il fondera le duo Two Colors, par l'intermédiaire du Groupe de Recherches Musicales. Il travaille aussi pour l'INA, où il restaure des enregistrements radiophoniques parfois légendaires. Voilà un moment qu'il est fidéle au label Pan European Recording, propriété de Arthur Peschaud, qui a sorti les albums de Koudlam parmi d'autres. Pluralis est sorti en toute confidentialité en 2011 au format vinyle, et renaît en digital au début du mois dernier.

 

Derrière la fourre tout étiquette du minimalisme se cache une musique exigeante, composée avec d'importantes contraintes, puisant son répertoire dans l'héritage sans limites et sans fonds des musiques occidentales. La dimension répétitive de certains tracks n'est pas seulement là pour asseoir des vertus hypnotiques, mais aussi pour positionner autrement l'angle d'écoute de l'auditeur éclairé. Le reflet de la texture ou de la nappe étant bien sûr forcément différent en fonction de comment on l'envisage dans l'investissement sonore de l'espace. C'est comme ça qu'on nomme vulgairement la démarche de spatialisation du son, et à terme, l'empreinte si "concrète" d'une musique finalement moins minimaliste qu'il n'y paraît.

Pluralis est un album de funambule, dont la musique est en permanence située entre les cieux et le gouffre. Même si la guitare y prend une place tout à fait importante, ce sont bien les synthétiseurs et les tape recorders qui témoignent de toute cette profondeur, de cette dimension si contemporaine et de ces quasi vestiges de musique tonale. Si laptop il y a, ce n'est sûrement pas pour geeker mais plutôt dans un souci de synchronisation et de gain en maîtrise. Et peu importe si certaines fréquences se révèlent plus éprouvantes, la contrainte est également valable pour l'écoutant.

Alors signalons plus particulièrement l'épopée hypnotique, progressive et syncopée de Cycle 500. Les ondes absorbantes de Pluralis (qui est la raison de mon couplet pré-cité sur la répétition). Les textures ondulées, cristallines et pleines d'echo du soyeux Dreamscape. La guitare écorchée agonisante du superbe Errance. Les drones plombants et l'atmosphère stellaire de l'apocalyptique Resonnance Magnétique. Les odeurs de conclave en plein désert de Surimpression. En fait, il faudrait tout signaler particulièrement, jusqu'à la lente descente vers les profondeurs de Souffle Continu ou Abysses.

 

Pluralis est un excellent album de musiques expérimentales, définitivement bien installé dans son époque (et même dans les autres). Il est plus que dommage qu'il n'ai pas bénéficié de plus de visibilité. Les acteurs de la chronique et de la critique en France en ont parlé mais n'ont finalement rien dit à son propos. Espérons que cette humble chronique participe à sa justifiée réhabilitation.

 

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par Ed Loxapac

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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 00:06
Sortie : octobre 2011
Label : Room 40
Genre : Ambient, Noise, Drone, Experimental
Note : 8,5/10

Parce que nous allons beaucoup parler cette année du label de Lawrence English, il était nécessaire de revenir sur une des release majeure qu'il enfanta en 2011.
Vétéran parmi les vétérans de la scène ambient et expérimentale, l'Australien Paul Gough aka Pimmon, a sévi depuis plus de quinze ans sur de nombreux labels remarquables. The Oansome Orbit est sorti il y a quelques mois sur Room40 (référence en la matière) alors que certains observateurs prédisent un futur rapprochement avec le 12k de Taylor Deupree.

Pimmon a toujours su parer sa musique d'une lumière aveuglante et de spectres envoûtants. Si cette application maintes fois transformée se répète encore aujourd'hui, elle est cette fois-ci enveloppée dans des contours bien plus ténébreux. L'ambivalence et le contraste sont les maîtres mots de cette œuvre époustouflante, oppressante et presque paranoïaque.

Les contours de nappes oniriques emplissent l'espace sonore tandis que de vils oiseaux de mauvais augure tissent leur nid poisseux. Les lacérations digitales, les drones froids et métalliques et des micro-glitchs granuleux viennent sonner le glas de l'inertie d'un territoire aussi vierge que gelé. Le spectacle est désarmant. Derrière les ballets majestueux sur des eaux prisonnières et les atterrissages réussis sur une banquise accueillante au premier plan, une sombre et bouillante émulsion vient craqueler la matière pure et l'engloutir, ne laissant dépasser qu'un faible halo persistant. Ou même parfois, il semble que des sons cristallins soient captifs d'une boîte de Pandore enfouie dans les abysses d'un puits sans fond (Shadow Catch You Tiring).

La première moitié de l’œuvre se joue des spectres, même si les tangentes les plus dark sont les plus immédiates au niveau du ressenti. Sur le morceau qui donne son étrange nom à l'opus, le vertige et le sentiment de perte d'équilibre sont encore là, et malgré son aspect jusqu’au-boutiste, la texture dominante se fait plus rassurante et plus claire. Le superbe et poreux Holding, Never To Be Passed renoue avec la splendeur et les auréoles du Pimmon que nous avons toujours connu. Cet art de donner une dimension quasi-orchestrale à une musique de laptop. Entrevue de courte durée puisque le non moins superbe (et imprononçable) Düülbludgers et son orée enchanteresse cède aux sombres mais plus que bienvenues sirènes noise débridées. Bright Light Resist Me et ses crins en fermeture, illustre avec classe toute la combustion de la palette artistique de l'Australien, posant l'âme à même un brasier régénérant et salvateur.

Aux confins de l'ambient sombre et polaire, du drone et du noise, aussi impénétrable que pénétrant, The Oansome Orbit est une des réussites abstraites et expérimentales de l'année passée. Même si elle est réservée à un auditoire plus qu'averti, ses rayons ambigus sont aptes à mettre sur le grill les plus coutumiers du genre. Bouleversant.

 

http://room40.org/store/image/cache/data/rm441_pimmon_oansome-450x450.jpg

par Ed Loxapac

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 10:26

Sortie : Février 2012 (première sortie : 1996)

Label : Type

Genre : Dub-techno, techno organique

Note : 8,5/10

 

Toi, l’ami autiste qui ne prend son plaisir que sur une musique sourde et omnisciente, prépare toi à prendre une leçon de dub-techno. Te voilà prévenu. L’exigeant label Type a cherché à taper fort, très fort, pour sa 100ème release. Au lieu de faire appel à une tête de gondole, le label a préféré exhumer un album méconnu de Porter Ricks, Biokinetics, sorti en 1996 sur le séminal Chain Reaction.

 

Mais comment un tel album a-t-il pu passer les années sans jamais être cité comme une référence absolue du genre ? Moi le premier, je dois bien avouer être un inconnu de Porter Ricks et lorsque j’ai écouté Biokinetics pour la première fois, j’ai cru avoir entre les oreilles un album de 2012. L’étonnement est total quand on apprend qu’il a plus de 15 ans et la leçon d’humilité est grande quand on se rend compte que Biokinetics renvoie dans la cour d’école des labels actuels de référence comme Ostgut Ton, Stroboscopic Artefacts ou encore Echochord.

D’ailleurs, c’est qui ce foutu Porter Ricks ? Il s’agit des allemands Thomas Köner et Andy Mellwig. Nos deux gaziers ont sorti trois albums à la fin des 90’s et puis rideau. Mais, non content d’avoir emprunté l’entité de Porter Ricks à Flipper le dauphin, ils ont aussi puisé leur son dans l’univers aquatique.

Pourtant, il est impossible de prédire le fait que l’on va boire la tasse alors que l’ouverture nous promet le contraire. Les 12 minutes inaugural de Port Gentil nous malaxent les neurones avec un gant de velours en imposant un rythmique métronomique tout droit sorti d’une locomotive lointaine. La lancinance s’installe avec docilité, vous prenant ainsi à revers pour le reste de l’album.

Biokinetics est un album vivant dont chaque respiration semble humaine. Implacablement, il étend son voile sur tout l’espace sonore, s’accaparant la moindre parcelle d’oxygène restante. Vous vous retrouvez la tête sous l’eau, sans échappatoire possible. La noyade étant assurée, il ne vous reste plus qu’à accepter la défaite et vous laisser couler. Les sons se répercutent sur votre corps, tentent de pénétrer votre organisme. Ne lutter pas, vous pourriez souffrir. Ainsi, de Nautical Dub à Nautical Nuba, vous vous retrouvez à errer au fond de l’eau, sans lumière pour vous guider. Etrangement, vous vous sentez bien. Cela est dû au fort pouvoir hypnotique des créations du duo.

Mais là où le duo subjugue davantage c’est dans son aspect précurseur. La techno organique et rampante n’a pas été inventée avec le Berghain, loin de là. Port Of Call ou Port Of Nuba vont vous faire gratter votre épiderme jusqu’au sang pour stopper ce putain d’eczéma qui n’en finit plus de proliférer. Si en plus, l’appel du vide se fait sentir à coups de puissantes rafales de vents, vous n’avez plus rien à faire, si ce n’est subir votre lente déliquescence.

 

Soyons clair, à l’écoute de ce Biokinetics, vous allez prendre une fulgurante leçon de dub-techno organique dans la tronche. L’album n’est pas à mettre entre toutes les oreilles, il demande une implication totale de la part de l’auditeur. On n’écoute pas Porter Ricks en dilettante, il faut vivre le trip totalement, le casque sur les oreilles, le volume au maximum. Si au bout du voyage, vous avez l’impression que vos jambes se dérobent et que votre cerveau fait de la mousseline, c’est tout à fait normal, vous venez de découvrir un chef d’œuvre.

 

http://images.hhv.de/catalog/detail_big/00264/264226.jpg

 

par B2B

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