Sortie : décembre 2011
Label : Autark Netlabel
Genre : Broken beat, Ambient, Experimental, Dub
Note : 8/10
Impossible de savoir de qui se compose Konsul Gnadenwalze. Il semblerait s'agir d'un duo autrichien/allemand, répertorié quasi nulle part. Ils ont en tout cas sorti en décembre dernier un très bon et court album de 30 minutes, sur le netlabel autrichien Autark, géré par Martin Huber et Lucas Norer.
Le concept autour de Gnad En Walzae est fabuleusement obscur. Les titres des tracks n'apporteront aucun outils de compréhension, chacun représentant des tirets, de un à six underscores. Un booklet de dix pages accompagnant l'objet pourrait être davantage en mesure de guider l'auditeur vers les situations et les idées dont Gnad En Walzae se veut être la bande son. A conditions de maîtriser la langue de Goethe, des notions de science des forces et des constituants fondamentaux de l'Univers et de métaphysique. De ce traité ésotérique ressortent des questions de hiérarchie des ordres anciens et une interrogation, celle de savoir si nous gravitions autour de notre environnent ou si notre environnement gravite autour de nous. Pas besoin pour autant d'y comprendre grand chose pour apprécier les illusions sonores, volatiles et captivantes de Konsul Gnadenwalze. Le décollage s'enclenche par une dépressurisation de l'air ambiant. La première piste ( _ ) pourrait mettre en musique une ascension à bord d'une soucoupe expérimentale, n'ayant pas pour but d'aller loin, mais que stagner et de parcourir en ligne droite diverses plages atmosphériques, sorte de Pachygrapsus Marmoratus artificiel et scientifique. Concrètement, – cette interprétation étant tout à fait personnelle – la 1._ conjugue des envolées progressives trempées de dub, un irrégulier tissage rythmique et un ingrédient mystère qui rend l'écoute béate et excessivement répétée. Le duo révèle un tel talent pour le beatmaking, les agencements délicats et les injections de field-recordings que l'ensemble se fond en une émanation, comme celle d'un seul corps, liquide ou gazeux, doté de propriétés nullement dénuées d'effets psychiques. En évoluant, l'album consolide la dimension brouillée et subtilement noisy. Baigné d'un léger psychédélisme, les beats emportent l'esprit vers d'autres sphères. Les environnements qui impriment sur la rétine, aussi abstraits et attrayant soient-ils, s'avèrent parfois vertigineux ( ___ ). Après une introduction dubbée, l'ambient devient le fil rouge du mouvement. Echos et revebs ne demeurant pas en reste, Konsul fait souvent le choix de l'arythmie, ne laissant ses morceaux s'orchestrer que par la force de vagues glitchées et de drones en sable mouvant ( _____ ). Organique, puissante, chimique et parasitée, la musique du duo pourrait se voir située entre les suaves expérimentations d'un Shlohmo et le dub sous-terrain de Shackleton. Ayant pourtant beaucoup d'estime pour les deux, j'aurais tendance aujourd'hui à leur préférer ces inconnus-ci. Il suffit d'écouter la dernière piste pour se prendre une micro-apocalyspe dans la gueule, sous la forme de déflagration de breakbeat aux textures étonnamment concrètes torpillant allègrement des couches et sinuosités liquoreuses.
Hautement énigmatique, Gnad En Walzae (la "grâce du rouleau compresseur", sans le troisième «a») est de ces compositions trop ignorées qui renferment des trésors de trip drogué et extatique. En téléchargement libre (ici). Prévenus, vous aurez été.
par Manolito