Sortie : septembre 2011
Label : Mute
Genre : électro-pop déprimante
Note : 4/10
Certains oublient trop souvent qu'avant de faire la connaissance de Ellen Allien ou de Modeselektor, et avant d'être érigé en enfant béni de la hype, Apparat faisait de la bonne musique. En effet, même si ces premiers albums sont souvent oubliés, ils peuvent se réclamer d'une place digne au rayon des très bonnes productions electronica de l'époque. Quelques excès et séances de babysitting en club (aux frais de Bpitch Control) plus tard, Sascha Ring allait participer à un projet annoncé comme une dream team électronique : Moderat, en compagnie des Modeselektor (qui eux aussi sortent très prochainement leur nouvel album). Il en accoucha un album de vaste esbroufe, où des artifices usés ne parvinrent à duper que ceux qui croyaient Modeselektor capables d'être plus qu'un simple one shot project. Puis vint une vulgaire participation à l'institution Dj Kicks (encensée ici par notre cher B2B). Délaissant pour quelques temps le dancefloor (et son label Shitkatapult) qui l'avait nommé roi instable, on annonçait Apparat attiré par les carillons de la pop depuis Walls. L'éssai devait se transformer avec The Devil's Walk, dont il est aujourd'hui question.
Pour apprécier ce nouvel opus à sa juste valeur, il faut être complètement passé à côté du minimalisme pop allemand d'hier, de Neon Golden de The Notwist et de l'excellent The Prayer Tree. Il faut aussi apprécier l'anémie et l'ennui qui précèdent l'inéluctable dépression. Et oui, derrière ses velléités profondes et féeriques, Apparat ne parvient qu'à transmettre ennui profond et indifférence. Même si il chante plutôt pal mal et juste, il use parfois d'instrumentaux acoustiques folktronica mal branlés, et d'épaisses nappes aussi grises qu'un dimanche après midi à l'ombre de villes aussi bucoliques que Manchester ou Charleroi. Alors oui, je dis que ça sent bon le sevrage. Du dancefloor, des excès. The Devil's Walk est un album à écouter seul sous la couette et dans le noir, enfermé depuis un mois dans une studette avec kitchenette non équipée, armé de benzos (l'euphytose marche aussi pour les plus méfiants envers les laboratoires Servier) et de sodas discount. Car même si l'ensemble est indéniablement pauvre, certains trouveront du réconfort dans cette production propre aux textures brutes et froides. Le problème est avant tout que l'allemand accumule les poncifs. On touche ici presque le point Godwin de la pop triste. Même au niveau des lyrics, dont Song Of Los est l'exemple le plus parlant, on ne parvient pas à dégager quoi que ce soit d'original, d'ambitieux ou même de touchant. Enfin si, sur Goodbye tout d'abord. Le seul titre ou Apparat laisse la place aux voix à Anja Plaschg de Soap & Skin, susurrant sa mélopée sur une production plus subtile et plus riche, où le piano et les grattes semblent entamer un chassé-croisé amoureux de bel effet. Il y a aussi le vaporeux Candil De La Calle, où la voix est troublée de plus d'effets (avec un côté un peu poseur excessif dans la voix quand même...) et où l'ambiance profonde arrive enfin à conférer un spleen appréciable. Mais c'est tout bordel. Le reste n'est qu'ennui et pauvreté.
Rassurez-vous, puisque la philosophie Let's Dance connaît actuellement un certain retour de flamme en cette époque de crise, nul doute que la hype va aimer et que vous pourrez trouver cet album bien placé dans les tops de fin d'année. On souhaite par ailleurs avec la discrétion et la mansuétude qui nous caractérise un prompt rétablissement à Apparat. Le Zyprexa est ton ami Sascha, et sinon l'album de Mohini Geisweiller est lui vachement bien.
par Ed Loxapac