Sortie : juin 2011
Label : M_nus Records
Genre : Techno minimal(ist)e
Note : 6,5/10
M_nus, le mythique label de Richie Hawtin, traverse depuis quelques années une période difficile, non sur un plan commercial, mais artistique. Après la déception Marc Houle (The Drift, chroniqué ici), Magda la décevante arlésienne (From The Fallen Page, ici), et le LP foireux de Marco Carola (Play it loud !, ici), cette année 2011 ne part pas mieux que les précédentes. Barem (aka Maurico Barembuem), outsider argentin de l’écurie avec seulement quelques EP à son actif, sort à son tour son premier long format, After the Storm. De quoi se rassurer un peu sur l’avenir de la minimale estampillée M_nus, reconnaissable entre mille ?
Faire partie de la team Hawtin requiert de suivre un cahier des charges assez rigoureux et contraignant ; car Hawtin est M_nus et réciproquement, d’où un effet de mimétisme souvent dommageable sur ses subalternes, sûrement trop heureux de pouvoir côtoyer le maître et les moyens technologiques démentiels de prod’ mis à leur disposition. D’où un double écueil à éviter : d’un côté le mimétisme stylistique et sonore trop poussé, de l’autre le bidouillage électronique pointu mais d’une austérité à effrayer un moine… et la crête entre ces deux fossés est très fine.
"There is nothing better than a blue sky after the storm" : telle est la phrase obtenue en mettant bout à bout le nom des morceaux du LP. Et le début de la phrase, "there is nothing", soit les trois premiers morceaux, inquiète immédiatement comme une mauvaise prédiction. Il ne fait aucun doute que l’on se trouve en présence d’une sortie M_nus : lignes de basse minimales (deux à trois notes), boucles de percus extraterrestres en cascade, production hyper-spatialisée, filtres et effets très typés… mais par contre la sauce peine à prendre, sur ces morceaux ni vraiment mentaux, ni vraiment dansant, qui se contentent d’osciller maladroitement entre ces deux registres. Même la texture sonore, entre une ambiance vintage du Detroit des 90’s et une minimale berlinoise un peu crispante et répertoriée, ne parvient pas à convaincre.
Le paradoxe est le suivant : lorsque Barem assume pleinement le son de sa famille et envoie sans complexe du M_nus dans le texte (Better, A, Blue), les compos fonctionnent parfaitement et raviront les amateurs du genre ; mais lorsque Barem fait du Barem (Than, Clear, Sky), l’atmosphère redescend immédiatement d’un cran. Les quelques idées qui structurent ses compos sont toutes dévoilées avant 1’30 de son effectif, ce qui laisse en général six longues minutes de développement travaillé mais souvent stérile, qui finit généralement par lasser. Le dernier morceau, After The Storm, présente une facette de Barem un peu plus aventureuse : d’abord presque langoureux, avec une rythmic/bass quasi deep-house, et quelques notes de saxo samplé, qui rappellent un peu la mélodie du célèbre générique de James Bond, confèrent une touche mélancolique paradoxale à ce premier long, trop long format.
Quatrième LP en demie teinte pour M_nus en 2011, cet After the Storm, décevant en soi, renforce les craintes que l’on ressent pour l’avenir du label, sa capacité à se renouveler, ou seulement à suivre les évolutions modernes de la sphère musicale électronique. Un nouvel LP de Hawtin (ou Plastikman) semble le seul horizon d’espoir. Richie, revient, on n’a plus les mêmes à la maison !
N.B : A l’heure où nous finalisions cette chronique, nous apprenons que Marc Houle, Magda et Troy Pierce quittent le navire M_nus, pour développer leur propre label Item & Things, fondé en 2006. Un signal d’alarme supplémentaire pour ce berceau de la minimale.
par Pingouin Anonyme