Sortie : août 2011
Label : Friends Of Friends
Genre : Glitch-hop, Ambient, soulful Electronica
Note : 7,5/10
Henry Laufer, 20 ans, Californien, s'était fait remarquer grâce à un premier et très bon album, dont le nom sonnait comme celui d'un burger (ici). D'emblée estampillé beatmaker au futur prometteur, Shlohmo a réalisé une poignée d'EP, majoritairement sortis sur Friends Of Friends : Camping (ici), Sippy Cup puis Places. Ce dernier, annonciateur de Bad Vibes, laissait présager un sérieux revirement. Celui qui se distinguait par son glitch-hop illuminé et ses textures soyeuses semble s'être pris de bonnes désillusions dans la gueule. Et en a tiré une sacrée maturité.
Intituler son album Bad Vibes n'est jamais anodin. Les déceptions et les épreuves que Shlohmo a – dans l'hypothèse – traversé confèrent à son deuxième essai une profondeur et une justesse insoupçonnée. Il semblerait qu'à l'heure du second album, la déprime soit créatrice de meilleurs crus que le bonheur crétin (voir le dernier Bibio, chroniqué ici). Associant un travail rythmique bancal et presque mousseux à la construction de délicats édifices frôlant la tristesse avec pudeur, Bad Vibes sonne comme la rencontre d'un Mount Kimbie rendu taciturne par un automne prématuré et de Baths en cellule de dégrisement. Entre électronica vaporeuse et dubstep dit "post", les lambeaux d'histoires de Shlohmo mêlent des bribes de folk, des choeurs fiévreux et soulful, des sonorités à la limite du lo-fi et des pulsations concrètes. S'il y a quelque chose que Shlohmo n'a pas abandonné, c'est bien l'utilisation de field-recordings, diffusant des sensations végétales, des crépitements et des bruits d'eau. A la première écoute cependant, l'ensemble a beau être caressant, il n'apparaît pas comme éclaboussé d'originalité. Ce n'est qu'en poursuivant l'immersion que l'on touche à la finesse des compositions et que l'on se rend à l'évidence : Bad Vibes n'est pas un album qui lasse. Pas un chef-d'oeuvre non plus, mais un recueil d'instants au charme boiteux, voguants entre la rêverie et le chuchotement désespéré. En 13 pistes, à aucun moment, Shlohmo ne se fourvoie. Il n'y a pas en Bad Vibes d'aspérité regrettable, de faute de goût qui nuancerait ce constat. Une saillie notable demeure, l'incroyable avant-dernier titre, qui s'avère de loin le plus expérimental. Trapped In A Burning House, portant son nom à ravir, verse dans un drone terrible, mouvant, hanté et criblé d'interférences. Du reste, on retiendra plus particulièrement le final puissant et presque post-rock de Your Stupid Face, le sublime et bouleversant Get Out et le délicat Seriously. Mais Bad Vibes n'est pas de ces albums que l'on découpe. C'est de bout en bout qu'il s'apprécie.
Entre glitch-hop, ambient, soul et électronica, Shlohmo livre un disque de fin d'été, dont la mélancolie perdurera pourtant bien au-delà.
par Manolito